jun 15, 1241 - Les Majorquins se voient autoriser à commercer avec l'Ifriqiya
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A. Nef montre bien que, en dépit d'une «religiosité diffuse », notamment dans certains textes, et du soutien parfois de la papauté, ce qui domine est avant tout le «caractère pragmatique, sur le plan politique et militaire, de la conquête normande » - pragmatisme que l'on retrouve ensuite dans la politique des Normands à l'égard des groupes arabo-musulmans, au cour de la thèse d'A. Nef.
Les motivations de Charles d'Anjou dans la croisade de 1270, souvent opposées à celles de son frère Louis IX, montrent à cet égard une réelle continuité. Ce pragmatisme ne vaut d'ailleurs pas que pour les souverains, comme le montre la politique
d'exportation de céréales en direction du Maghreb étudiée par G. L. Borghese: l'Ifrîqiya n'est en effet pas incluse dans les destinations pour lesquelles la papauté impose un embargo, comme l'Égypte mamelouke. Cette exception, que l'on peut rapprocher de l'autorisation accordée aux Majorquins en 1241 de commercer avec le Maghreb et justifiée par l'importance vitale de ce commerce pour l'île, obéit surtout à la nécessité d'écouler la production céréalière du royaume angevin. Là encore, la continuité avec les périodes précédentes est évidente, comme le montre G. Mandalà à propos de la politique de Frédéric II, qui visait à la fois à tirer un profit maximal de la vente des grains (en l'occurrence au Maghreb ou en al-Andalus où sévissait alors une famine) et à se fournir en or nécessaire à la frappe des augustales et au financement de la politique de l'empereur. Mais ces exportations contrôlées visent aussi à faire des céréales une arme diplomatique au service de la politique de Charles en Méditerranée, et plus particulièrement en direction du Maghreb. Les relations diplomatiques et militaires doivent donc être lues moins en termes d'idéologie ou de légitimation d'un pouvoir par la lutte contre l'infidèle, assez peu visibles dans les politiques mises en œuvre comme dans les discours, que dans le cadre des stratégies à la fois régionales et méditerranéennes des souverains normands, souabes, angevins puis aragonais.
Source : LES RELATIONS ENTRE ITALIE MÉRIDIONALE, SICILE ET MAGHREB AU MOYEN ÂGE : AUTOUR DE TROIS OUVRAGES RÉCENTS -
Dominique VALÉRIAN
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