20 déc. 653 - Procès du pape Martin Ier et de Maxime le confesseur face à l’autorité impériale
Description:
Le procès eut lieu dans un tribunal civil, et non ecclésiastique, à Constantinople, avec pour objectif de protéger l’autorité impériale en une période d’insécurité politique majeure. Le gouvernement cherchait à se couvrir et à détourner la responsabilité et la faute vers d’autres. Le pape Martin Ier et Maxime furent pris pour exemple afin de montrer les conséquences de la désobéissance à l’autorité impériale, surtout parce que les échecs militaires d’Héraclius et de Constans II pouvaient être imputés au soutien impérial au monoénergisme et au monothélisme.
Martin arriva peut-être à Constantinople le 17 septembre 653 et son procès commença vers le 20 décembre 653. L’arrestation de Maxime eut probablement lieu à peu près en même temps que celle de Martin, mais son propre procès se déroula en 655. L’accusation de trahison ne signifie pas que l’Afrique byzantine était nécessairement perdue à jamais. En réalité, la monnaie impériale byzantine était encore frappée à Carthage à cette époque et pendant plusieurs décennies. L’Afrique demeurait encore byzantine, bien que de manière précaire. Toutefois, les lourds tributs imposés par les musulmans signifiaient déjà que Byzance n’exerçait plus un contrôle monopolistique sur l’Afrique. Mais ces arrangements ne concernaient pas un condominium semblable à celui qui existait temporairement au VIIe siècle à Chypre entre musulmans et Byzantins. Les accusations impériales contre Maxime répondaient à une situation embarrassante. L’allégation était apparemment que l’Afrique avait déjà été trahie aux Sarrasins ou aux musulmans, même si ces derniers n’avaient pas encore réussi à imposer leur autorité partout en Afrique du Nord.
Le pape Théodore aurait rapporté à l’exarque Grégoire une vision de Maxime selon laquelle Grégoire triompherait de la cause de Constans II. Le processus de perte de l’Afrique était déjà, aux yeux des autorités constantinopolitaines, largement avancé vers 655, lesquelles cherchaient des boucs émissaires pour détourner toute responsabilité d’elles-mêmes.
Les autorités byzantines allèrent jusqu’à accuser le pape Martin Ier de collaboration avec les musulmans. Il nia farouchement de telles accusations gouvernementales : « À aucun moment je n’ai envoyé de lettres aux Sarrasins, ni, comme certains le disent, un écrit (tomus) concernant ce qu’ils devraient croire ; je n’ai jamais non plus expédié d’argent, sauf seulement à ces serviteurs de Dieu voyageant en ce lieu pour des raisons d’aumône, et le peu que nous leur avons fourni ne fut certainement pas transmis aux Sarrasins. » On ne peut que spéculer sur ce que contenait ce tomus perdu du pape Martin concernant ce que les « Sarrasins » devaient croire. Peut-être s’agissait-il d’une tentative papale de communiquer ou de trouver un moyen d’établir un lien avec les musulmans à une époque où les croyances et pratiques proto-musulmanes étaient supposées encore en formation et donc malléables. Peut-être certains pensaient-ils qu’il n’y avait pas de fossé irrévocable entre chrétiens et musulmans. Mais il n’est pas clair si les relations supposées de Martin avec les « Sarrasins » concernaient ceux du Levant ou d’Afrique du Nord, ou les deux.
L’explication pourrait être plus complexe. Martin Ier aurait entretenu un certain contact avec les musulmans et plus spécifiquement des transactions financières avec eux. Il se peut qu’il ait cherché à communiquer avec le clergé chrétien dans les zones sous contrôle musulman, à leur fournir une aide financière et à soutenir les chrétiens en détresse dans ces régions. D’autres papes avaient essayé d’accommoder certaines pratiques locales d’autres peuples tout en encourageant leur conversion. Même si ces activités – dont les faits réels demeurent obscurs – étaient bien intentionnées, elles pouvaient, au sens strict, impliquer des paiements ou des arrangements avec les autorités musulmanes. Les soupçons concernant ces activités supposées déclenchèrent la fureur impériale. Martin Ier ne réussit pas à convaincre ses accusateurs impériaux d’abandonner leur procès contre lui. Il mourut en exil à Chersonèse, en Crimée, le 16 septembre 655.
Source: Muslim Expansion and Byzantine Collapse in North Africa - Walter Kaegi
Ajouté au bande de temps:
Date: